PROJET Yohan Laffort avec CULTURE ET LIBERTé 3 séances, 3 lundis 9-16-23 mai 2022 REDACTIONNEL : Isabelle Lefebvre
Pour les 3 lettres de Rani, Mimouna et Fatima, nul doute que la construction d’une lettre ne se fait pas en une séance. Elles ont débobiné avec pudeur tour à tour leur expérience de vie et non en une seule fois ; à ce titre la lettre doit être tournée en vue du documentaire. Les idées, les souvenirs émergeront au fil de nos discussions et de mes questions. Certes, les idées sont là, elles parlent facilement le français mais l’expression écrite, le vocabulaire et l’orthographe présentent quelques failles. Il s’agissait pour moi d’être au plus près de leurs idées, de leurs sentiments, l’écueil étant de ne pas déformer leur propos.
Rani, Indienne d’origine, avait déjà bien entamé sa lettre destinée à son amie Sahi et ce dès mon arrivée. Elle se présente pleine d’envies, débordante d’énergie. Il fallait d’ailleurs la canaliser pour construire sa lettre ! Elle avait besoin sans cesse d’apporter des précisions sur toutes ses nombreuses activités entre peinture, couture, cuisine (blets préparés à l’indienne), musique (cithare et harmonium), jardinage au Jardin de la Source. Son implication est également vive dans le théâtre grâce à Culture et Liberté. Que de cordes à son arc ! Toutes ces expériences lui ont donné confiance en elle et qui plus est, son bonheur c’est d’aider les autres !
Mimouna s’adresse à Lille et le fil rouge de sa lettre, c’est toute sa gratitude envers cette ville qui lui fait dire : « Grâce à Lille, j’ai retrouvé la tendresse comme d’un proche qui me donne le courage d’avancer … » Désormais elle ne me sent plus étrangère se retrouvant avec les gens de sa communauté et aussi par le biais des magasins, des marchés. Place de Wazemmes, je fréquente souvent le Brabant Market ; elle y trouve tout ce qui lui fait plaisir : les services à thé, les tenues traditionnelles qui me rappellent mon Algérie et la douceur d’Oran. Souvenir précieux : son commerce de tissus au pays qui n’a pu perdurer. Grâce à toi Lille, je rencontre des personnes me favorisant une meilleure intégration. Ainsi je me sens pleinement citoyenne lilloise !
Fatima , d’origine marocaine , ayant vécu en Lybie. Au point de départ, c’est l’émotion de Fatima qui la submerge ; sa lettre est destinée à son père défunt ; je l’ai d’abord sentie hésitante et pudique quant à la démarche du documentaire. Elle exprime au travers de sa lettre beaucoup de gratitude envers son père. Puis tout a cédé la place au partage : Fatima m’a montré des photos en l’occurrence de la Lybie, des monuments archéologiques et un petit film fait par son frère. Le renoncement quant à son projet d’enseigner à l’Université s’est vu remplacé par l’enseignement de sa langue maternelle, la langue arabe en qualité d’animatrice à la maison de quartier Moulins. Elle a hâte chaque semaine de dispenser aux enfants des cours ludiques et pédagogiques au moyen de la calligraphie, du collage ... Son poste d’animatrice à la Maison de quartier Moulins a valeur de thérapie dans la mesure où elle n’est pas restée sur un échec mais remporte une victoire sur elle-même. Ma sortie avec Fatima à l’Hospice Comtesse a succédé à une première visite avec la maison de quartier de Moulins. Elle fit montre jeudi dernier d’une grande curiosité à propos de l’architecture de cet ancien hôpital Jeanne de Flandres et de tout son patrimoine artistique.

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